Marie-Hélène Lafon : Nos vies (Buchet-Chastel, août 2017)



Nos vies
Marie-Hélène Lafon
Buchet-Chastel,
août 2017
192 pages


A short book with a simple structure, Nos vies (Our Lives) by Marie-Hélène Lafon, is about a retired woman Jeanne Santoire, who observes two people in her local Francprix supermarket – Gordana, the cashier at checkout counter number four and the customer who is secretly in love with her – and, like a detective (or a writer), Jeanne makes up a story about their lives.  She invents what she doesn’t know about these – you might have to call them – ‘characters’ (although they, like Jeanne, feel like real people), and weaves into this narrative thoughts about her own life: her parents, her ex-lover Karim who disappeared out her life twenty years ago, her neighbours, and people from the choir where she sings.  Nos vies is about people who are very alone.  But it is worth noting the word ‘Nos’ (‘Our’) in the title – that recognises we are not alone in finding life difficult.  Nos vies is about empathy, being curious about others, and, I’d say, about that very zeitgeist concept: resilience. 

Nos vies par Marie-Hélène Lafon est un livre court avec une structure simple : une femme retraitée, Jeanne Santoire, observe deux personnes à son Francprix local – Gordana, la caissière à la caisse quatre et un client qui l’aime en secret – et comme une détective (ou bien une écrivaine) Jeanne crée une histoire autour de leurs vies.  Elle invente ce qu’elle ne sait pas à propos de ces – il faudrait les appeler – ‘personnages’ (quoiqu’ils semblent être, comme Jeanne, des personnes réelles).  Jeanne tisse dans ce récit des pensées sur sa propre vie : ses parents, son ex-amant Karim qui a disparu il y a une vingtaine d’années, ses voisins, et les personnes du chœur où elle chante.  Nos vies raconte la vie de gens qui sont très seuls. Mais il est à noter dans ce titre le mot ‘Nos’ qui rappelle qu’on n’est pas seul à trouver la vie difficile.  Nos vies est un roman sur l’empathie, sur la curiosité à l’égard d’autrui, et, je dirais aussi, sur ce concept tellement dans l’air du temps : la résilience.     

Marie-Hélène Lafon présente son invention « Nos vies »: La Grande Librairie Published on 3 Nov 2017


Caroline Lamarche -Nous sommes à la lisière – nouvelles (Gallimard, 2019)

Nous sommes à la lisière – nouvelles

Caroline Lamarche

Gallimard, 2019

176 pages

Winner of the short story category of Le Prix Goncourt, Nous sommes à la lisière (‘We are at the Very Edge’) by the Belgian writer Caroline Lamarche, is a collection of nine stories about a planet in crisis.  To be ‘à la lisière’ means: to be at the extreme edge of something – in this case: destruction.  The ‘We’ /‘Nous’ in the title is all inclusive, referring to all living beings, humans, plants, animals, the entire planet.  For, as the horse groom in the short story ‘Mensonge’, says: ‘what is bad for one is bad for the other, our health is that of the planet’.  But this is not a ‘Message’ book (Caroline Lamarche, ‘La cane frappait au carreau’, Libération, 15 March, 2019).  With these stories, some written over twenty years ago, Caroline Lamarche simply invites us, through her clear, clean style, to pay close attention.  My two favourite stories are ‘Frou-Frou’ (about a volunteer at a bird rescue centre and his duck Frou-Frou) and ‘Tish’ (about two homeless women and their cat Tish – ‘shit’, i.e. hashish backwards).  The recurring theme of Nous sommes à la lisière is compassion.

Caroline Lamarche : «La cane frappait au carreau» Par Frédérique Fanchette Envoyé spéciale à Overijse (Belgique) Photos Colin Delfosse — 15 mars 2019 à 17:07


Prix Goncourt de la Nouvelle 2019, Nous sommes à la lisière – de l’autrice belge Caroline Lamarche – est une collection de nouvelles sur notre planète en péril‘La lisière, c’est l’extrémité de quelque chose, à l’origine ‘l’extrémité d’un tissu’.  Donc « être à la lisière » c’est se tenir sur cette limite extrême, on pourrait presque dire « au bord du gouffre » en faitLe ‘Nous’ du titre est inclusif – il inclut tous les être vivants, les être-humains, les plantes, les animaux, la planète entière.  Car, comme dit le palefrenier dans la deuxième nouvelle ‘Mensonge’: ‘ce qui est mauvais pour les uns est mauvais pour les autres, notre santé, c’est celle de la planète’.  Mais ce n’est pas ‘un livre à message’ (Caroline Lamarche, «La cane frappait au carreau», Libération, 15 mars 2019).  Avec ces histoires, dont certaines écrites il y a vingt ans, Caroline Lamarche nous invite tout simplement, de par son style limpide, à être attentifs.  Mes deux nouvelles favorites sont ‘Frou-Foru’ (à propos d’une cane blessée) et ‘Tish’ (à propos d’un couple de femmes SDF et leur chat Tish – ‘shit’, c.-à-d. le haschich, à l’envers).  Le thème récurrent de Nous sommes à la lisière est la compassion. 

Delphine de Vigan : Les gratitudes (Éditions JC Lattès / Le Masque, 2019)

Les gratitudes

Delphine de Vigan

Éditions JC Lattès / Le Masque, 2019

176 pages

 


Les gratitudes 
est un livre court et simple sur la gratitude en action.  Michka est en début d’aphasie de Wernicke appelé aussi aphasie réceptive, un trouble dont un des symptômes est qu’on mélange les mots un peu similaires – deux exemples : ‘d’accord’ devient ‘d’abord’ et merci devient ‘merdi’.  Michka doit aller vivre dans un Ehpad, où elle est suivie par un orthophoniste gentil et respectueux, Jérôme, et reçoit des visites d’une jeune amie, Marie.  Les gratitudes est un roman triste et plein d’espoir sur la bonté humaine, sur les réalités du vieillissement et sur le besoin humain d’exprimer sa gratitude.  J’ai beaucoup aimé ce livre pour son style sans fioriture et pour son mélange de douleur et de compassion digne de l’im/perfection de l’art Kintsugi.
Merci à Nathalie Denizot de m’avoir envoyé ce livre.

Delphine de Vigan :
« Vieillir, c’est apprendre à perdre »
France Inter
Published on 11 Mar 2019
 

Les gratitudes is a short, simple book about gratitude in action.  Michka has Wernicke’s aphasia – or ‘receptive aphasia’, a condition where, among other symptoms, you mix up words that sound the same: for example, ‘okay’ becomes ‘obey’.  She has to move into an old people’s home, where she has speech therapy from kind, respectful Jérôme, and is visited by a grateful young friend, Marie.  Les gratitudes is a sad, hopeful novel about human goodness, the realities of ageing and the human need to express one’s gratitude.  I loved this book for its unadorned style and its fusion of pain and compassion that is nigh-on Kintsugi-/im/perfect.
Thank you to Nathalie Denizot for sending me this book.

Now available in English: 

Gratitude (Bloomsbury, 2021) Delphine de Vigan  (Author), George Miller (Translator)


Delphine de Vigan Interview
The Dangerousness of Writing

(Louisiana Channel – published on 27 Dec 2018)

claudine galea: Les choses comme elles sont (Gallimard, 2019)

Les choses comme elles sont

claudine galea

Gallimard, 2019

248 pages

L’histoire se passe à Marseille entre les années 60 et 80. C’est celle d’une enfant (puis adolescente, puis jeune femme) dotée – on le découvre dès les toutes premières pages – d’une curiosité exceptionnelle.  ‘La petite’, comme la dénomme l’auteure claudine galea (écrits sans majuscules), apprend à lire très jeune et trouve aussitôt dans la lecture un moyen d’élargir son monde et de d’échapper à sa vie familiale extrêmement difficile. Fille d’un père pied-noir et d’une mère communiste dont on pourrait dire que le mariage (qui ne durera pas) a été l’acte posé par deux morts, ‘la petite’ se met à élucider divers ‘trous noirs’ de cette histoire familiale.  Elle peint ainsi un portrait complexe de ces deux personnes (qui s’aiment comme elles peuvent et se disputent comme on s’y attendrait peut-être, tant au niveau politique que personnel) sans jamais les enfermer dans des boites rigides.  Claudine galea n’évite pas non plus ce qui dans la vie de son jeune personnage principal pourrait déranger le lecteur / la lectrice – tant et si bien qu’il y en aura peut-être qui vont vouloir sauter certains passages de ce livre.  Merci à Reuben Lane et à Simon Hiler de m’avoir envoyé ce livre par endroits dérangeant.

CLAUDINE GALEA, L’ÉCRITURE AU JOUR LE JOUR – la vidéo dure 2 minutes 36 secondes (Théâtre l’Echangeur)

This novel is set in Marseilles between the 60’s and the 80’s and tells the story of a child, then adolescent then young woman, who demonstrates – as you learn over the very first pages – a great curiosity.  ‘La petite’, as the author claudine galea (not capitalized) calls her, learns to read at a very young age and quickly discovers that reading can be a way of expanding her world, and provide an escape from her fraught family life.  Daughter of a pied-noir father and communist mother – whose marriage (that won’t last) was triggered, you could say, by two deaths – ‘la petite’ sets out to fill in various ‘memory blanks’.  She paints a complex portrait of these two flawed characters (who love each other the best they can, and argue, as one might expect, on both political and personal matters) without ever putting them in boxes.  Nor does claudine galea avoid including aspects of her main character’s life that some readers might find disturbing; so much so that some may feel compelled to skip a few pages of this book. Thank you to Reuben Lane and Simon Hiler for sending me this (in places) disturbing book.

PS : link to a song mentioned in this book – Viens là – by Françoise Hardy : https://www.youtube.com/watch?v=NuUGmfwV7Rc

Pascale Kramer: Une Famille (Flammarion, 2018)

Une famille

Pascale Kramer

Flammarion, 2018

In this novel, Une famille by Pascale Kramer, you hear, exclusively and successively, from family members affected by a relative’s alcoholism.  The primary focus is on a family whose attention revolves around one family member, Romain, the alcoholic – who in this narrative has no voice but is everyone’s obsession.  And it is this particular focus – the clue is in the title: A Family (not: ‘An Alcoholic’) – that, paradoxically, gives the book all its power: you get to hear from people who are powerless over a person who is powerless over alcohol.   This multiple subjective point of view, where each person expresses themselves one after another, and couched in a simple structure – the same night before the birth of a baby girl and following day, as experienced by each family member: the father-in-law, sisters, brother, and mother – is, I feel, perfectly chosen for the book’s theme: the family disease of alcoholism.  Secrets are in this way revealed, as the uncensored thoughts and opinions of each flawed (and traumatised) character are given voice.

If you are affected by someone else’s drinking, see: Al-Anon
(‘Al-Anon Family Groups are for the families & friends of alcoholics who share their experience, strength, & hope in order to solve their common problems.’)

Dans ce roman, Une famille par Pascale Kramer, la parole est donnée exclusivement et successivement aux membres d’une famille affectée par l’alcoolisme de l’un d’entre eux.  Le sujet principal est une famille dont l’attention tourne autour d’un de ses membres : Romain, un trentenaire malade alcoolique – sans voix dans ce récit mais toutefois l’obsession de tous.  Et c’est ce focus particulier dont l’indice est dans le titre (Une famille et non pas Un alcoolique) qui, paradoxalement, donne au livre toute sa force : l’auteur nous donne à entendre les témoignages de gens impuissants devant une personne elle-même impuissante devant l’alcool.  Ce point de vue subjectif, multiple, où chacun s’exprime à tour de rôle, articulé dans une structure simple – la veille de la naissance d’une enfant et le lendemain, tels qu’ils sont vécus par chaque membre de la famille : le beau-père, les sœurs, le frère et la mère – est, me semble-t-il, parfaitement choisi pour le thème principal du livre : la maladie familiale de l’alcoolisme.  Les secrets sont ainsi dévoilés au fur et à mesure que les les non-dits de chaque personnage imparfait (et traumatisé surtout) se font entendre.

Si vous êtes affecté/e par l’alcoolisme d’un proche : Al-Anon
(‘Les membres Al-Anon sont des personnes qui ont été affectées par la consommation d’alcool d’une autre personne.’)

Un an auprès des Alcooliques Anonymes
Le mouvement des Alcooliques Anonymes fête cette année ses 60 ans d’existence en France. A l’occasion de cet anniversaire, Interception vous emmène au coeur de leurs réunions. Témoignages rares, bruts, sans filtre.

Dimanche 18 octobre 2020
par Philippe Bardonnaud , Vanessa Descouraux , Géraldine Hallot

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Nina Bouraoui: TOUS LES HOMMES DÉSIRENT NATURELLEMENT SAVOIR

Nina Bouraoui
TOUS LES HOMMES DÉSIRENT NATURELLEMENT SAVOIR
Lattès, 2018
256 pages

 

‘I am perhaps also a writer because I am homosexual’ (Nina Bouraoui, La Grande Librairie 19.9.18)

Nina Bouraoui started writing at eighteen when she started going to the famous lesbian nightclub in Paris, ‘Le Kat’, where she met people she says (La Grande Librairie : 19.9.18) she’d never otherwise have mixed with during the day – prostitutes, ex-detainees as well as lawyers, teachers.  Le Katmandou, run by the writer Elula Perrin, has provided material for many of Bouraoui’s books, including Tous les hommes désirent naturellement savoir, her sixteenth.  Made up of short counterpoint chapters, with the repeated titles, backwards and forwards in time – Becoming, Remembering, Knowing and Being – TLHDNS relates Bouraoui’s childhood in Algeria and in France, her evenings at Le Kat, and how she became a writer.  She explains that she has, in fact, three cultures (a huge advantage, she says, for a writer): Algerian (from her father and from having lived in Algeria until the age of 14); French (from her mother); and homosexual.  Her mother, a great reader, plays an important role in Bouraoui becoming a writer – I loved the image her sleeping in the sun, with a book lying open against her, ‘flesh against flesh’ (TLHDNS).  As a writer, I savoured TLHDNS, because it tells the story of a writer’s beginnings; and, like Bouraoui, I too ventured, in my late teens, onto the lesbian clubbing scene (in my case, in New Zealand), so this book was quite a fascinating read for me.

Ps Available in English: Nina Bouraoui’s Tomboy (University of Nebraska Press, 2007)

pps Nina Bouraoui’s All Men Want to Know (Viking, 2020) is now available in English, thanks to the translator Aneesa Abbas Higgins.

 

‘Je suis peut-être aussi écrivain parce que je suis homosexuelle.’  (Nina Bouraoui, LGL 19.9.18)

Nina Bouraoui a commencé à écrire dès l’âge de 18 ans quand elle a commencé à fréquenter le Kat, une boite de nuit lesbienne mythique où elle a rencontré des personnes dont elle dit qu’elle ne les aurait jamais pu croiser la journée’ (La Grande Librairie : 19.9.18) – des prostituées, des anciennes détenues, des avocates.  Le Katmandou, géré par l’écrivaine Elula Perrin, a fourni du matériau pour maints livres de Bouraoui, dont Tous les hommes désirent naturellement savoir, son seizième.  Construit de courts chapitres en contrepoint, avec des titres répétés et des allers-retours dans le temps – Devenir, Se souvenir, Savoir et Être – TLHDNS raconte l’enfance de l’auteure entre l’Algérie et la France, ses nuits au Kat et ses débuts d’écrivaine.  Elle explique qu’elle a trois cultures (gros avantage, dit-elle, pour un écrivain): algérienne (par son père et pour avoir vécu en Algérie jusqu’à l’âge de 14 ans), française par sa mère, et homosexuelle.  Sa mère, grande lectrice, est aussi très importante dans ce parcours d’écrivaine; j’ai beaucoup aimé l’image d’elle, allongée au soleil, tenant  ‘ses romans contre elle […] chair contre chair’ (TLHDNS).  Étant moi-même écrivaine, J’ai savouré TLHDNS, puisqu’il raconte une écrivaine en devenir; et, comme Bouraoui, je me suis aventurée dans ma jeunesse dans le milieu lesbien (néo-zélandais en l’occurrence), ce roman a été pour moi une lecture fascinante.

Nina Bouraoui présente « Tous les hommes désirent naturellement savoir »
Published on 4 Oct 2018

Nina Bouraoui La Grande Librairie 19 septembre 2018 

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Faïza Guène : Millénium blues (Fayard, 2018)

Millénium blues
Faïza Guène

Millénium Blues (Fayard) is a novel about nostalgia, regrets and various forms of forgiveness.  With its fifty-five short and ultra short chapters made up of sharp dialogue and crisp spare writing, it reads like a graphic novel.  The book is set in Paris from the late 1990s to the present time and recounts fifteen years – non-chronologically, since, as the author points out, memory doesn’t work like that – in the lives of two ‘Generation Y’ friends: Zouzou and Carmen.  It’s a fast-moving read, right from the start, beginning with an accident during a heat-wave.  Millénium Blues shows how time passes all too quickly and the importance of being awake to the present, of valuing each moment.  The book has a background sound-track of songs (from ABBA to Idir), and is punctuated by historical events, such as: The World Cup 1998; September 11 2001; the second round of the presidential elections in France (Right against Extreme-Right) in 2002.  An event of a different sort, and key to this novel, is the ‘forfait Millénium’, a telephone deal offered by Bouygues Télécom leading up to the Millenium, where you paid a fixed amount and could have unlimited talk-time in the evenings and over the weekend.  This allowed people to free up how they spoke on the phone, ‘to tell each other things aside from what was essential’ (‘se dire autre chose que l’essentiel’).  It’s the dialogue between the characters that is, for me, the book’s great appeal.  Faïza Guène has created a novel that is both light and profound, with exchanges between the characters – such as those between the main character, Zouzou, and Simone, a woman in her eighties, and between Zouzou and her father – that are by their very lack of sentimentality, poignant.

Musical ps:  A Vava Inouva by Idir  https://www.youtube.com/watch?v=JCpc7ch4nd4

Millénium Blues (Fayard) est un roman sur la nostalgie, les regrets et les diverses formes de pardon.  Avec ses cinquante-cinq chapitres courts, ultra courts même parfois, bâtis de dialogues percutants et d’une écriture économe, ce livre fait un peu ‘roman graphique’.  L’histoire a lieu à Paris, de la fin des années ‘90 à nos jours, et raconte quinze années (pas dans l’ordre, puisque, comme dit l’auteure, ce n’est pas comme ça que marche la mémoire) de la vie des deux amies de la ‘Génération Y’ : Zouzou et Carmen.  Et cette histoire file à toute allure, dès le départ, en commençant par un accident en pleine canicule.  Millénium Blues montre à quel point le temps passe très vite, et l’importance cruciale d’être consciente du moment présent, de vivre pleinement chaque instant.  Le livre se déroule sur un fond de bande son (d’ABBA à Idir), et est jalonnée d’événements historiques, tels que la coupe du monde 1998, le 11 septembre, le second tour de l’élection présidentielle de 2002 (la droite contre l’extrême-droite).  Un événement d’un autre genre et fondamental à ce roman, c’est le ‘forfait Millénium’, une offre téléphonique de Bouygues Télécom lancée juste avant le passage à l’an 2000, où on payait une somme fixe et pouvait parler sans limite le soir et pendant le week-end.  Cela permettait aux gens de parler plus librement au téléphone, de ‘se dire autre chose que l’essentiel’.  ce sont les dialogues entre les personnages qui font pour moi tout l’attrait du livre.  Faïza Guène a crée un roman à la fois léger et profond, avec des échanges entre personnages (comme ceux d’entre le personnage principal, Zouzou, et Simone, une octogénaire, et entre Zouzou et son père) qui sont, par leur anti-sentimentalisme, justement, poignants.

ps Faïza Guène est l’invitée d’Augustin Trapenard sur France Interhttps://www.franceinter.fr/emissions/boomerang/boomerang-10-janvier-2018

Anise Koltz PRESSÉE DE VIVRE suivi de APRÈS

Anise Koltz
PRESSÉE DE VIVRE suivi de APRÈS
Arfuyen, 2018
176 pages

Prix Goncourt de la poésie Robert Sabatier 2018 pour l’ensemble de son œuvre

The title of this two-in-one collection, Pressée de vivre suivi de Après (Eager to Live followed by Afterwards), is worth stopping to note – ‘mindfully’ – before opening this book; as it tells you a lot about the strong intelligence and sober humour of this Luxembourg writer, Anise Koltz, who in May of this year was awarded the Prix Goncourt de la poésie Robert Sabatier for a lifetime achievement in poetry. I was privileged to hear Anise Koltz read from her parallel text (translated by Anne-Marie Glasheen), At the Edge of Night / Au bord de la nuit (Arc, 2009), at a Poetry Parnassus event at London’s Southbank Centre in 2012; and I remember her saying (I’m rephrasing here) that it is ‘what comes next’ that is the natural focus of her writerly attention these days (these years, we could say – she is now ninety). Pressée de vivre suivi de Après gives dignity to old age; it de-pathologizes the fact of ageing; quietly countering the ageist viewpoint, which, like mono-culturalism, assumes it speaks for everyone. But this book, written from ‘la zone provisoire’ (‘from the provisional zone’ p.35), is anything but a manifesto; each page is a meditation on time, life, another life (death), past, present, future, fate, destiny, writing, dreams, truth, lies, shadows. This writing ‘d’un autre monde’ (‘from another world’ page 173) is made up of mystery and questions without answers. How refreshing.

Ps : To read Anise Koltz in English, see: At the Edge of Night / Au bord de la nuit (Arc, 2009)

Le titre de ce double recueil de poésie, Pressée de vivre suivi de Après, mérite qu’on s’y attarde un temps – pleinement, j’ai envie de dire – avant d’entamer la lecture de cet ouvrage; car il en dit long sur l’intelligence profonde et l’humour sobre de cette poète luxembourgeoise, Anise Koltz, lauréate en mai dernier du Prix Goncourt de la poésie Robert Sabatier pour l’ensemble de son œuvre. J’ai eu l’énorme privilège d’entendre Anise Koltz lire des extraits de sa collection bilingue (traduite par Anne-Marie Glasheen), At the Edge of Night / Au bord de la nuit (Arc, 2009), lors du Poetry Parnassus organisé au Southbank Centre à Londres en 2012 ; et je me souviens d’elle disant (je la paraphrase) que ce qui retenait son attention de poète ces jours-ci (ces années-ci, pourrions-nous dire – elle a maintenant quatre-vingt-dix ans), c’est l’après, c’est ce qui arrive après. Pressée de vivre suivi de Après rend hommage à la vieillesse ; il dé-pathologise le fait de vieillir ; et s’inscrit contre le point de vue agiste qui, comme le mono-culturalisme, croit rendre compte de la vie entière. Mais ce livre est tout sauf un manifeste ; chaque page est une méditation sur le temps, sur la vie, sur une autre vie (la mort), sur le futur, le destin, sur l’écriture, les rêves, la vérité et les mensonges, sur l’ombre aussi. Cette écriture venue ‘d’un autre monde’ (page 173) est faite de mystère et de questions sans réponses. Rafraîchissant.

Ps : Regarder ici Anise Koltz lisant les premiers vers de son poème ‘Prologue’ (page 60, At the Edge of Night / Au bord de la nuit, Arc, 2009) lors du Poetry Parnassus en 2012.

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Carole Fives: UNE FEMME AU TÉLÉPHONE – Collection : L’arbalète / Gallimard, 2017

Carole Fives                                                                                               
UNE FEMME AU TÉLÉPHONE
Collection : L’arbalète / Gallimard, 2017
112 pages

 

 

 

 

 

 

Une femme au téléphone de Carole Fives est une succession de messages qu’une mère sexagénaire laisse au répondeur de sa fille, alternant ‘plainte-reproche-plainte-reproche’ (Carole Fives au Livre Paris, 2017) et – à part quelques dérives dans des commentaires ni désirés ni demandés sur la vie de sa fille – tournant autour des problèmes de santé de la mère.  Un livre à prescrire à celles et à ceux qui se retrouvent dans une situation un peu similaire de la protagoniste (muette dans le texte) à l’écoute quotidien de sa mère – qu’elle aime, à l’évidence, beaucoup.  Mais il n’est pas nécessaire d’être dans une relation où il y a chantage affectif pour apprécier l’humour caustique de cette écriture au style incroyablement dépouillé et simple comme du Chopin (qui me rappelle celui de Dorthe Nors).
Allô, Carole Fives, à quand le prochain livre ?
Ah bon ?  Déjà sorti ?
Tenir jusqu’à l’aube de chez L’arbalète / Gallimard – oui oui je sais mais le prochain.
Et il va falloir que quelqu’un se mette à les traduire en anglais, ces livres, car tout le monde ne parle pas français et  –
allô ?

 

Ps en non fiction : Régine Detambel : les livres prennent soin de vous : pour une bibliothérapie créative ; essai. (Actes Sud, 2015)
Pps : À l’occasion de Livre Paris 2017, Carole Fives vous présente son ouvrage « Une femme au téléphone » aux éditions Gallimard.


Une femme au téléphone by Carole Fives is a succession of messages that a sixty-year-old mother leaves on her daughter’s answerphone machine – messages that alternate ‘complaint reproach-complaint-reproach’ (see Carole Fives at Livre Paris, 2017) and – aside from various unasked for, unwanted comments on her daughter’s life – centre around the mother’s health issues.  This is an uplifting book that could be prescribed to those who are in a situation similar to that of the (mute in the text) protagonist, who listens daily to her mother – whom she clearly loves.  But you don’t have to be in a relationship full of emotional blackmail and manipulation in order to appreciate Carole Fives’ dry humour and masterfully simple, uncluttered writing style (that reminds me a little of Dorthe Nors).
Hello, Carole Fives, when’s the next book?
Really?  It’s already out?
Tenir jusqu’à l’aube from L’arbalète / Gallimard – yeah yeah I know but the next one.
And there’s going to have to be a translation of these books, because not everyone speaks French and –
hello?

Ps: Carole Five’s first novel is called: Que nos vies aient l’air d’un film parfait – a line from the (very) 80s song ‘Amoureux Solitaires’ by Lio.

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Violaine Huisman: FUGITIVE PARCE QUE REINE – Gallimard, 2018


Violaine Huisman
Fugitive parce que reine
Gallimard, 2018

256 pages

prix Françoise-Sagan 2018
prix Marie-Claire du roman féminin 2018)
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Update March 2022:
The Book of Mother (Virago Press), translation by Leslie Camhi, is longlisted for the International Booker Prize
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In Fugitive parce que reine (the title comes from a line in Proust’s Albertine disparue), Violaine Huisman writes about what she knows but has also to imagine, ‘the character of the woman behind [her] mother’ (La Grande Librairie, May 2018): Catherine Cremnitz, a beautiful and determined woman, diagnosed in her forties as ‘manic-depressive’, who avoided traffic jams by driving on the footpath, got great pleasure, satisfaction and some not inexpensive clothes from occasional shoplifting; a person of extremes, uninterested in social norms, and who believed in thinking for yourself and not following the crowd.  I especially loved the tour de force Nadia Comaneci dialogue of extreme emotional swings (see, for example, page 195).  Huisman tells the story of this much adored woman, who died by suicide in 2009, ‘to give her back her humanity’ (FPR, p. 100).  This book is of course threaded with pain, but it is also lit with irreverent humour, and above all love.


Ps: good news
: Fugitive parce que reine will soon be available in translation – in English, German, Dutch, Italian and Spanish.

October 2021 UPDATE / it’s due from Virago 7 October 2021:
THE BOOK OF MOTHER by Violaine Huisman,
translated by Leslie Camhil
Virago Books

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Update March 2022:
The Book of Mother (Virago Press), translation by Leslie Camhi, is longlisted for the International Booker Prize

Congratulations, Leslie Camhi: @CamhiLeslie

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Dans Fugitive parce que reine (la phrase est tirée d’Albertine disparue) Violaine Huisman évoque ce qu’elle connaît mais aussi ce qu’elle doit imaginer, du ‘personnage de la femme derrière [sa] mère’ (La Grande Librairie, 17 mai 2018) : Catherine Cremnitz, une femme belle et déterminée, diagnostiquée ‘maniaco-dépressive’ dans sa quarantaine, qui, kleptomane occasionnelle, trouvait son bonheur dans des magasins de vêtements haut de gamme et conduisait en montant sur les trottoirs pour éviter les embouteillages ; un être aux extrêmes, qui s’intéressait peu aux normes sociales restrictives, pour qui la liberté de penser pour soi et d’agir comme on voudrait primait en tout.  J’ai surtout aimé le dialogue, véritable tour de force à la Nadia Comaneci, alternant une succession rapide d’émotions contrastées.  Huisman imagine la vie de cette personne tant adorée, qui s’est donnée la mort en 2009, ‘pour lui rendre son humanité’ (FPR, page 100).  Autant ce roman est tissé de douleur, autant il l’est – et même davantage peut-être – d’humour irrévérencieux et d’amour surtout.


Ps
en documentaire / non-fiction: ‘La vie après le suicide d’un proche France 5’ – réalisatrice, Katia Chapoutier ; et, de Katia Chapoutier : La vie après le suicide d’un proche: témoignages d’espoir (Le Passeur, 2018)

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